Les athées iront au paradis, grâce à Dieu par Patrice DARTEVELLE

Les athées iront au paradis, grâce à Dieu

On raconte bien des choses convenues sur le nouveau pape François. De nombreux croyants européens projettent sur lui leur nostalgie de Jean XXIII et du concile de Vatican II (1).

Qu’il ait des goûts simples n’est peut-être pas une posture, mais imaginer qu’un pape conservateur ait obligatoirement le désir du luxe et de l’or est une vue particulièrement simplificatrice de la psychologie humaine et de la réalité historique: bien des dictateurs ont mené une vie matérielle des plus raisonnables mais c’est souvent moins vrai pour leurs lieutenants.

Tout indique qu’il ne devrait pas y avoir d’évolution doctrinale significative sous le pontificat de François (2). Pour la gestion de la Curie et de l’argent de l’Eglise, on verra bien.

Il y a pourtant eu une surprise authentique le 22 mai 2013, lors de l’homélie quotidienne du Pape. Il y a raconté l’histoire d’un catholique qui demandait si même les athées connaîtraient la rédemption. Et le Pape de répondre que “même eux, la connaîtraient”. La seule question pour lui est de faire le bien (mais sous quelle définition?). (3)

Le moins que l’on puisse dire est que ce n’est pas la position traditionnelle de l’Eglise, qui réserve le paradis à ceux qui sont membres de seule”bonne Eglise”. Bien plus, l’habitude, y compris récente, par exemple par la bouche ou la plume de Jean-Paul II, est de voir dans l’incroyance la source des crimes au sens le plus trivial du terme.

Bien évidemment dès le lendemain de l’homélie pontificale, un porte-parole de l’Eglise, le P. Tomas Rosica réaffirmait la doctrine officielle selon laquelle il ne peut y avoir de salut pour qui refuse d’entrer ou de rester dans l’Eglise (4).

Un sermon purement oral est bien entendu sans valeur mais la déclaration restera.

Quels peuvent être les motifs d’un pape jésuite qui n’ignore rien de la doctrine? Faute d’explications plus étendues, on en est réduit aux hypothèses.

Peut-être est-ce contrairement à ce qui semble aux athées, une pièce (à casser?) dans une optique de réévangélisation. Dans le cas des athées il s’agit de celle de l’Europe et l’idée que la foi peut concerner les athées figure dans la nouvelle encyclique Lumen fidei  (5).

Mais l’Amérique latine -dans une tout autre optique- aussi est un problème: en une bonne génération, les protestants évangéliques, partis de presque rien, y représentent 13% de la population et jusqu’à 25 % au Brésil (6). Et certains latino-américains se prennent à rêver de réévangéliser l’Europe comme l’Europe les avait évangélisés autrefois (6). Le travail sur place ne paraît pourtant pas manquer sauf à considérer que les évangéliques ne sont pas un si grand problème pour les catholiques.

S’agissant des athées, commencer par la menace de l’enfer -dans un continent où une seule une minorité parmi les croyants croit à une vie après la mort- n’est sûrement pas une bonne entrée en matière. Mieux vaut une captatio benevolentiae, à l’instar du Pape.

Reste tout de même l’essentiel: si les athées sont assurés du paradis, pourquoi se faire catholique?

 

Patrice Dartevelle

 

 

(1)  un exemple entre cent: Paul Mandy,Un début de pontificat porteur d’espérances,La Libre Belgique du 11 juin 2013

(2)  cf Raphaël Jacquerye, Les cent jours du pape François, La Libre Belgique du 2 juillet 2013

(3)  d’après le site du Guardian (http://www.guardian.co.uk/world/2013/may//22/pope-francis-atheists-can-be-good )

(4)  cf Henri Lindell,site la Matinale-LaVie ( http://www.lavie.fr/lamatinale/s-athees-iront-quand-meme-en-enfer-selon-L…le 29/05/2013)

(5)  Le Monde des 7-8 juillet 2013

(6)  cf Maria Arana,Preparing for the Pope,International Herald Tribune du 21 juin 2013