À propos de l’article du « SOIR » du 05/10/2013 “Les athées disent urbi et orbi « Dieu n’existe pas » ” ?

Pour une fois qu’ils mettent « DIEU » dans un titre, c’est pour nous faire dire des bêtises.

Et plus loin, on insiste encore : « mais c’est publiquement qu’ils aimeraient pouvoir dire haut et fort : Dieu n’existe pas.» 

Ce genre de titre et d’affirmation a tendance à nous faire passer pour aussi dogmatiques que les croyants et donc, de nous affubler des mêmes défauts qu’eux  :  le croyant affirme « Dieu existe », l’athée : « Dieu n’existe pas », du pareil au même et la balance est équilibrée.

C’est un peu trop facile.

Il y a déjà un demi-siècle – au moins – que je m’évertue à faire comprendre que je ne suis pas né en criant « dieu n’existe pas », parce de « dieu » je n’avais aucune idée de ce qu’il pouvait être.

Maintenant non plus, d’ailleurs.

Les humains ne croient pas à dieu dès leur naissance, ils finissent seulement par croire ceux qui leur en parlent.

Et aussi, ne connaissant pas de « dieu », je ne me suis pas baptisé moi-même du nom d’« athée ».

Ce sont les croyants qui m’ont appelé et m’appellent toujours comme ça. Depuis des siècles il en a été ainsi : ce sont les croyants en un dieu qui appellent « athée » ceux qui ne croient pas en leur(s) dieu(x), mais peut-être à d’autres.

Pour traiter quelqu’un d’athée, il faut d’abord croire en un ou des dieux, sinon le terme n’a aucun sens. Sans dieux, pas d’athées.

Par exemple, les Romains traitaient les premiers chrétiens d’athées, et ensuite, c’est « logique », ce sont les chrétiens qui ont traité les Romains de (païens) athées.

Et pourtant, des dieux, ils n’en manquaient pas ! Voilà donc des « athées polythéistes » !

On aura tout vu.

 

De plus, je ne vois pas pour quel motif (mais si, en fait, je vois) on voudrait nous faire passer pour des idiots qui nient l’existence de ce qu’ils ne connaissent pas.

Personnellement, je ne parle de « dieu » qu’avec quelqu’un qui m’explique d’abord ce qu’il entend par là. J’ai d’ailleurs déjà fait l’expérience plusieurs fois, et pas avec n’importe qui, croyez-moi ( !).

Les dignitaires religieux, toujours prudents, commencent dans ce cas par m’expliquer que « dieu » est inconnaissable, ou, encore mieux, qu’on ne peut le définir.

Mes réponses sont alors invariables depuis des années, toujours d’actualité, et il n’y a rien à changer :

« Inconnaissable ? Soit, mais comment savez-vous cela ? »

Il y a toujours de l’inconnu, certes, mais décréter qu’il est inconnaissable, c’est en savoir des choses sur lui !

« Il ne peut être défini ? Mais c’est bien là une définition, si je ne me trompe ? »

Comment donc les croyants peuvent-ils dire depuis autant de siècles autant de choses sur ce qu’ils ne peuvent définir sans le connaître ?  Et aussi pourquoi voudrait-on absolument que nous, athées, disions quoi que ce soit à propos de quelque chose décrété d’avance comme inconnaissable ou indéfinissable ?

 

J’étais présent à cette « interview », et je n’ai jamais comparé celui qui se dit non croyant sans se dire athée à « un végétarien qui mange son  steak » ! Dans ce contexte, cela  n’a aucun sens et ça a l’air complètement idiot.

J’ai utilisé cette métaphore, que j’emploie depuis de nombreuses années, pour comparer  un  catholique qui se dit “non pratiquant” à quelqu’un qui se dit végétarien et qui mange de la viande (un végétarien non pratiquant…).

Ce n’est pas très malin non plus, d’accord, j’en conviens, mais au moins ça a du sens.

Je connais des chrétiens qui ne vont pas à l’église, mais les catholiques qui ne « pratiquent » pas ne devraient plus se définir comme « catholiques », du moins à mon sens…  Mais pourquoi pas, me dit on, c’est bien leur droit ! Certes oui, je ne le conteste pas, mais pourquoi donc encore se dire « catholique » ?

D’où le végétarien en question et son steak.

Ailleurs on me fait dire : « S’il fallait un dieu punisseur pour que nous nous comportions correctement, nous ne serions pas moraux ! Il n’y a pas besoin de Dieu pour être humain. »

Ce n’est peut-être pas faux, mais hors du contexte, ça n’a que peu de sens, et ne constitue qu’une simple affirmation gratuite.

En fait, j’avais cité ce bon Jean-Paul II qui avait osé dire : « Un humanisme sans dieu est inhumain. » et j’avais expliqué que précisément c’est le contraire, d’où finalement ce bout de phrase sans queue ni  tête.

Aurait-on craint de citer cette belle pensée d’un pape ?

 

Ajoutez à cela qu’on a pris bien soin de définir, en annexe,  ce que serait un agnostique :

« Personne qui estime que tout ce qui est au-delà du donné expérimental est inconnaissable. Autrement dit, on ne peut prouver l’existence de Dieu… ni son inexistence. »

Y a-t-il a un athée qui prétend connaître ce qui est au-delà du donné expérimental ?

Hume, Locke, Berkeley et bien d’autres « empiriques » ont déjà tenu ce discours, et il a fallu un Thomas Huxley, pour qui le terme « athéisme » paraissait déjà trop « dogmatique », pour inventer le mot « agnostique » au XIXème siècle. Depuis l’antiquité grecque, avouez qu’il en a fallu du temps !

Il faut aussi dire qu’il ne voulait pas être confondu avec les gauchistes révolutionnaires de l’époque, mais c’est une autre histoire…

Mais d’où cette  manie d’être obligé de  « prouver » l’inexistence d’une chose que l’on décrète improuvable ? Ca n’a aucun sens.

Il y a des siècles que des philosophes se sont exprimés sur ce qui est au-delà du « donné expérimental » et d’autres, depuis la plus haute antiquité ont établi que c’est à celui qui affirme qu’il revient de prouver ce qu’il dit. Donc, nous y voilà, si les athées sont des gens qui disent que « dieu » n’existe pas, eh bien qu’ils le prouvent…

Remarquez qu’il m’arrive bien plus souvent qu’à mon tour de dire que « dieu » n’existe pas, pour autant qu’on me le définisse. Si « dieu » est par exemple celui de la Bible judaïque récupéré par les chrétiens, je peux dire en toute certitude (l’agnostique n’a pas de certitudes, paraît-il) que ce « dieu » n’existe pas : l’univers entier n’a pas été créé en six “jours”, la terre n’est pas plate, l’homme n’a pas été créé avant la femme, la femme n’a pas été tirée d’une côte de l’homme (je pense au végétarien qui appelle sa femme : ma chère et tendre côtelette), les végétaux n’ont pas été créés avant qu’il ne pleuve et toutes ces sortes de choses.

Mais il paraît que ce sont des choses auxquelles il ne faut plus croire maintenant, ces textes seraient à interpréter, autrement dit, on peut leur faire dire ce qu’on veut.

Bien, alors je vais écrire une autre « Bible »…

Dans cette annexe, il y a mieux encore.

On y définit le « sceptique » comme « quelqu’un qui met en doute la croyance religieuse, le dogme. »

C’est sans doute quelqu’un qui doute que « dieu » a créé la terre (et l’univers entier) en six jours, mais peut-être que c’est vrai ? Allez savoir.

Qu’en pense-t-il ?

Mais finalement, l’athée y est défini comme une « personne qui ne croit pas en Dieu (mais lequel, bon sang !) ni en l’existence de toute divinité. »

Ce n’est pas si mal, mais en ce qui me concerne, je suis athée d’abord parce que je suis incroyant.

Je ne crois pas aux fantômes, aux trolls, aux dragons, aux licornes aux revenants, au père Noël ni à St Nicolas. J’en verrais, je  ne devrais plus y croire.

Dites-moi, si « dieu » existait vraiment, pourquoi devrait-on y croire ?

 

J. Robyn