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Archives par mot-clé: Italie

La religion, vue par un athée italien du XXIe siècle

Posté le 18 mai 2019 Par ABA Publié dans Athéisme Laisser un commentaire
Enrico Nevolo

Traduction assortie de quelques considérations évoquées dans un dialogue maïeutique par Marco Valdo M. I.

La dernière livraison du périodique italien L’ATEO (l’athée), bimestriel de l’UAAR[1], édité à Rome, publication au titre sans équivoque, était consacré au sujet brûlant : « Che cose è la religione ? », ce qui se traduit[2] par : « Qu’est-ce que la religion ? ». J’écris sujet brûlant, car à le lire, on se dit que certains ont été brûlés pour moins que ça. Du reste, c’est un brûlot qui descend le Tibre jusqu’au-devant du Vatican. Mais procédons.

Dans ce numéro spécial, il y a un article qui a retenu mon attention. Il s’intitule « Religione. Due o tre cose che penso di lei » – « Religion. Deux ou trois choses que je pense d’elle »[3]. L’auteur, Enrico Nivolo est originaire d’Asti (né en 1988) et pour l’heure, prépare une thèse sur « laïcité et pluralisme dans l’école italienne » auprès de l’Université de Turin.

Il est intéressant à plus d’un titre de découvrir ce qu’un Italien lettré contemporain peut bien avoir à penser de la « religion » : c’est l’objet de la première partie de ce texte et en profiter (odieusement) pour glisser quelques considérations impies supplémentaires, à la suite.

L’édification de la Religion

Après quelques réflexions introductives d’ordre historico-philologiques, on en vient à ceci : « Au niveau général, la religion peut être comprise comme un aspect de la vie des êtres humains, utile à la compréhension des rapports socioculturels, qui jette « ses racines dans quelque chose (le sacré) ou quelqu’un (êtres surhumains, dieux, Dieu), qui transcende la dimension humaine, se présentant en même temps comme son fondement. Les religions sont des productions qui s’efforcent de donner un sens au monde, des créations de l’homme en tant qu’animal symbolique et créateur de culture et d’histoire »[4]. En termes anthropologiques, selon les définitions de la religion fournies par Melford Elliot Spiro et Clifford Geertz, les religions peuvent être comprises comme des institutions qui, en créant un système articulé de symboles, coordonnent les relations entre les êtres humains et les êtres surnaturels postulés par eux-mêmes, grâce à la stimulation d’états d’âme et de motivations fondés sur une série de concepts concrets élaborés sur l’existence, qui rendent les états d’âme et les motivations absolument réalistes.[5]

La Religion comme pharmakon

La raison de la naissance de ces institutions (religieuses) peut s’expliquer en reprenant le concept de nausée élaboré par Jean-Paul Sartre – (c’est-à-dire) le malaise que ressentent les êtres humains lorsqu’ils réalisent l’absence de fondement de la réalité et l’absurdité qui les entoure[6]. Les religions, grâce à leurs propriétés d’attribution de sens, peuvent dès lors être décrites comme un puissant pharmakon contre la nausée. Un pharmakon, qui, comme le suggère Jacques Derrida, peut avoir deux effets, celui du remède et celui du poison[7]. Par le biais de la religion, dont la capacité principale est précisément celle de pouvoir donner un sens à tout, les êtres humains ne remarquent pas le Réel, ils l’évitent et entrent, pour ainsi dire, dans une forme de schizophrénie collective qui est capable de réparer tout ce qui ne fonctionne pas, de lui donner du sens. En d’autres termes, la religion rejette le Réel quand il devient trop agressif, quand ce qui ne va pas risque d’écraser le sujet et triomphe quand elle réussit à l’éloigner totalement du Réel, le mettant en sécurité dans son illusion[8] ; les religions, au moyen de dispositifs efficaces d’attribution de sens permettent de rejeter l’émergence de ce que Jacques Lacan définit comme le réel – ce qui perturbe l’unité plus ou moins cohérente de la réalité et de son sens.

La Religion contre le réel

Maintenant, il est bon de s’arrêter et de réfléchir un instant aux conséquences qui peuvent survenir au moment où un sujet entre dans cette illusion : que se passe-t-il quand le Réel est obscurci et que la fiction du Symbolique religieux est complètement oubliée ? Même si chaque sujet a besoin d’atteindre une certaine stabilité, il y a des cas où cette stabilité atteint des degrés inhumains : cela se produit chaque fois qu’on tente de transformer l’ensemble des accords socioculturels qui composent une religion en réalités immuables qui doivent être tenues préservées de tout changement social. À la religion est ainsi conférée une existence autonome et indépendante par rapport à la réalité sociale et les fidèles oublient que ce en quoi ils croient est seulement une tentative humaine de donner un sens au Réel en commençant à penser qu’il est la Vérité absolue, révélée par un être divin, suprême et infaillible. Ces religions se considèrent elles-mêmes, leurs valeurs et leurs propres origines comme détachées de la culture humaine dans laquelle elles circulent et qu’elles considèrent comme quelque chose d’autre dont il faut se dissocier… Selon Olivier Roy, cette tentative de séparer les religions du contexte politique et culturel dans lequel elles sont immergées est un phénomène aujourd’hui plus que jamais important en Europe, où les principales religions sont unies par une tentative de déterritorialisation et de déculturation[9].

Le Credo du crédit

De la même façon que la culpabilité capitaliste s’est émancipée des péchés et de leur rédemption, son culte s’est libéré des objets sacrés : les fidèles du capitalisme ne croient qu’en la foi, ils croient au crédit pur, autrement dit à l’argent. L’argent est devenu le Dieu du capitalisme, un Dieu qui ne vit plus dans les églises, mais dans les banques, lesquelles gouvernent le crédit et administrent la foi, qui est devenue substance en l’argent mercantilisé. Les adeptes du capitalisme sont incités par les banques-églises à vivre dans un état d’endettement continu qui ne doit pas pouvoir s’éteindre : emprunter de l’argent est le seul sacrement de la religion capitaliste et équivaut à un acte de foi dans un avenir qui les conduira à vivre dans un état d’impérissable désespoir.[10]

Le Sens unique

Alors, si cette tentative du capitalisme de s’imposer comme une religion globale a plongé ses fidèles dans un état de désespoir sans possibilité de salut, il est possible que le retour aux religions dont nous avons été témoins ces dernières décennies soit une requête de rédemption du désespoir et du chaos causés par le capitalisme lui-même. À bien y regarder, à partir du XVIIIe siècle, les critères de vérité élaborés par la religion ont commencé à disparaître et les êtres humains ont de plus en plus délégué au marché et aux banques la tâche d’en élaborer de nouveaux, mais la religion capitaliste ne s’est pas avérée être une voie suffisante pour le salut et ne semble pas avoir pleinement accompli la tâche traditionnelle de « rassurance »[11] sociale, historiquement assignée aux religions, semant au contraire le chaos et l’insécurité sociale. Pour ces raisons, de nombreux êtres humains ont commencé à réévaluer les instruments d’attribution de sens élaborés par les religions. Si le capitalisme a atteint le summum de sa gloire au cours du XXe siècle, il n’a cependant pas pu provoquer le déclin des religions, dont il n’a contribué qu’à modifier le statut de légitimité : dans le passé, tout dépendait de Dieu et de sa grâce, alors qu’aujourd’hui tout tourne autour de la liberté individuelle et des limites que lui imposent les lois des États. La recherche de sens à travers les possibilités offertes par la religion reste un chemin encore pratiqué par de nombreux sujets, dont beaucoup, cependant, mettent au premier plan l’expérience de la foi, laissant à l’arrière-plan les contenus dogmatiques. Wade Carl Roof souligne l’individualité des parcours de recherche de sens, lesquels s’écartent souvent de ceux indiqués par une religion particulière malgré le fait que le fidèle prétend y appartenir, et pour beaucoup d’entre eux préfère adopter la dénomination de spiritualité plutôt que celle de religion. En d’autres termes, le fidèle contemporain se construit aujourd’hui un système de sens ad personam sans rejeter en même temps l’appartenance à sa communauté religieuse[12].

Retour aux fondamentaux

Néanmoins, d’autres sujets retournent à la religion de manière traditionnelle et intégriste, à la recherche d’un sens de leur existence, d’une identité solide qui contraste le devenir chaotique du réel et la liquidité dont est faite la modernité. C’est le cas du fondamentalisme, produit de la modernité qui s’y oppose en refusant ses objectifs et ses principes, mais qui utilise ses instruments technologiques. Dans les différentes variantes religieuses (catholique, protestante, islamique, juive, hindoue…), les fondamentalismes sont tous unis par la question du fondement éthique et religieux de l’État : pour les fondamentalistes, le fondement d’un État doit résider dans une religion commune et aucune forme de laïcité n’est envisagée[13]. La religiosité individualisée et le fondamentalisme religieux sont les deux faces du retour contemporain à la religion, deux faces qui démontrent la validité de la définition de la religion comme un pharmakon qu’on utilise contre l’angoisse qu’on éprouve quand on constate l’absence du sens. Que ce soit le pharmakon comme remède ou le pharmakon comme poison, c’est toujours d’un médicament qu’il s’agit et toujours l’absence de sens est considérée comme une maladie.

La voie humaine

Mais n’est-il pas possible de trouver une autre voie ? Une voie plus humaine ? Une proposition que je voudrais avancer ici pour surmonter les mensonges de survie élaborés par la religion est de se tourner vers la science … Si, dans le but d’essayer de donner un sens et une explication à la réalité, au lieu de retourner aux illusions des religions, les sujets s’adressaient à la science, ils découvriraient, par exemple, que l’absence de matière est une condition spécifique de nombreux modèles cosmologiques. À chercher des réponses sur la réalité dans un livre de physique, plutôt que dans La Sainte Bible, on découvrirait, par exemple, que la peur du néant et du vide sont injustifiées, car ils sont le berceau de l’existence et la nature ultime de la réalité, tant au niveau microscopique que macroscopique[14]. Pour situer l’approche logique d’Odifreddi, juste une courte citation : « La conclusione dell’ analisi logica [applicata agli argomenti della teologia razionale] è dunque che non solo non è razionale credere in Dio ma che è razionale non credervi. »[15] (La conclusion de l’analyse logique [appliquée aux arguments de la théologie rationnelle] est donc que non seulement il n’est pas rationnel de croire en Dieu mais qu’il est rationnel de n’y pas croire). Par l’adoption d’une approche scientifique de la réalité, on apprend à être sceptique, à remettre en question les vérités qui nous sont proposées, à en chercher des preuves empiriques qui en démontrent la validité, en trouvant des réponses plus humaines sur l’existence. Connaître la science et en adopter l’attitude de vérification des hypothèses annule les effets collatéraux les plus dévastateurs du pharmakon religieux – les poisons du fondamentalisme. À cet égard, Sam Harris souligne que si on enseigne aux jeunes que les propositions religieuses ne doivent pas être justifiées, alors que cette obligation vaut pour toutes les autres [propositions], la société se remplit d’êtres irrationnels et potentiellement capables de commettre n’importe quel acte pour défendre leur propre foi[16]. Éduquer les jeunes avec une mentalité religieuse pleine de dogmes les expose davantage au risque de l’intégrisme : la plupart des terroristes qui se font sauter dans les lieux publics en tuant des innocents ne sont pas des psychotiques, mais la plupart du temps des sujets motivés par un idéalisme religieux fort, des sujets qui ont consommé trop de pharmakon religieux.

Le doute scientifique, fondement de la démocratie

Alors, que faire ? Si la mentalité religieuse est peu habituée au doute et tend à écarter toutes les preuves qui fausseraient la vérité de la foi, une éducation scientifique saine et rigoureuse pourrait être un excellent antidote. Un scientifique croit en un paradigme qui s’est avéré sur la base de nombreuses preuves empiriques, mais quand apparaissent des preuves contraires, il n’hésite pas à abandonner ce paradigme et à en élaborer un nouveau. Ne serait-il pas venu de moment d’envoyer les jeunes à l’école de physique quantique, plutôt qu’au catéchisme ? Ne serait-il désormais pas venu le moment d’arrêter définitivement de continuer à tromper les générations en les poussant à entrer sur le territoire du Symbolique religieux et de commencer au contraire à leur fournir les instruments nécessaires pour gérer de manière humaine les urgences du Réel ? Ne réaliserait-on pas une société plus démocratique grâce à la valorisation du doute ?

Dialogue maïeutique

Et finalement, que conclure, Lucien l’âne mon ami.

Être athée ou ne pas être religieux, telle est la question, dit Lucien l’âne.

Être athée, dit Marco Valdo M.I., être défini athée est terriblement gênant, on a l’impression d’être trahi par le mot. Être athée ramène traditionnellement à l’affirmation de l’inexistence de Dieu, mais tout le monde sent bien que ça n’a pas de sens d’être défini par rapport à Dieu, à son existence ou à son inexistence.

Note, dit Lucien l’âne, en ce qui me concerne, Dieu en soi ne me dérange pas ! Il n’existe pas. Dieu n’existe pas, mais la religion, les religions, les religieux existent et drôlement. La religion, c’est la onzième plaie et elle intègre toutes les autres.

En effet, reprend Marco Valdo M.I., c’est la plaie de l’humanité. En fait, ce mot « athée » et tout ce qui s’ensuit, est une erreur de langage (volontaire ?), inventée par les religieux. En vérité, il s’agissait de maintenir Dieu intact, puisqu’il est par essence intouchable et dès lors, qu’il devait être nié, il devenait incontournable. Un athée sans dieu auquel s’opposer n’existe pas. En désignant l’athée, on désigne Dieu comme incontournable fondement. C’est un tour de passe-passe, on a inversé la réalité. La réalité, c’est que l’homme existe et qu’il invente dieu, les dieux.

Mais, demande Lucien l’âne, quel est le but de cette manipulation ?

Oh, répond Marco Valdo M.I., le sens de la manœuvre est clair : il s’agit de dévier les critiques sur un non-objet, un objectif factice de sorte à les rendre parfaitement vaines et d’empêcher de mettre en cause ce qui agit dans le réel : la religion, les religions, les religieux et les institutions correspondantes. En clair, il s’agit de focaliser le débat sur Dieu – son existence, son inexistence, sa toute-puissance, ses pensées, ses commandements, etc. et par ce leurre, empêcher d’atteindre la véritable cible de la critique : la religion.

Comment on en sort alors, interroge Lucien l’âne ?

Le seul moyen de déjouer ce piège est de s’en prendre à l’objet réel, aux objets réels que l’on entend critiquer : la religion et les religieux et non pas les croyances qui sont choses privées et fantasmatiques tant qu’on ne les fait pas intervenir dans le réel. Il ne s’agit pas d’être athées, si ce n’est peut-être par ricochet de l’usage, mais il s’agit certainement d’être anti-religion(s), anti-religieux, car les religions et les religieux sont les seuls à agir dans le réel et les vrais ennemis de l’humaine nation comme toutes les téléologies qui promettent un avenir radieux.

Et alors, dit Lucien l’âne, que faire ?

Mais, dit Marco Valdo M.I., même s’il pleut à Ostende et qu’on se pose des questions :

« Se sont perdus, se sont perdus
Comme à Ostende et comme partout
Quand sur la ville tombe la pluie
Et qu’on se demande si c’est utile
Et puis surtout si ça vaut le coup,
Si ça vaut le coup de vivre sa vie. »[17]

En réalité, c’est tout simple : bonne ou mauvaise, il s’agit de vivre sa vie.


Notes

  1. L’ATEO, bimestrale dell’UAAR, n°1/2019, Roma, 40 p. – UAAR : Unione degli Atei e degli Agnostici Razionalisti – Union des Athées et des Agnostiques et des Rationalistes.↑
  2. Toutes les citations de l’article originel sont traduites par l’auteur du présent article.↑
  3. Enrico Nivolo (enrico.nivolo@anche.no), Religione ; Due o tre cose que penso di lei, L’ATEO, 1/2019, pp.18-21.↑
  4. Giovanni Firolamo, Che cos’è la religione. Temi metodi problemi, Torino, Einaudi, 2004, p. 76.↑
  5. Melford Elliot Melford Elliot Spiro, 1966, Religion. Problems of Definition and Explanation, in Banton (a cura di) – Anthropological Approaches to the Study of Religion (1966), Londra, Tavistock et Clifford Geertz, 1987, Interpretazione di culture (1973), Bologna, Il Mulino.↑
  6. Jean-Paul Sartre, La Nausée, Gallimard, Paris, 1938, 249 p.↑
  7. Jacques Derrida, La farmacia di Platone (1972), 2007, Milano, Jaca Book. Voir en français Jacques Derrida, La pharmacie de Platon, repris dans La dissémination, Seuil, Paris, (1972), 416 p.↑
  8. Jacques Lacan, Il Trionfo della religione, Einaudi Torino, 1975 – voir Le Triomphe de la religion. Précédé de : Discours aux catholiques, Seuil, Paris, 2005, 112 p.↑
  9. Olivier Roy, La santa ignoranza. Religioni senza cultura, Milano, Feltrinelli, 2017. Voir en français : La Sainte ignorance – Le temps de la religion sans culture, Seuil, Paris, 2012, 384 p.↑
  10. Walter Benjamin, Il capitalismo come religione, (1920) in Lo straniero, Anno XVII, n° 155. Voir en français : « Le capitalisme comme religion », in W. Benjamin, Fragments philosophiques, politiques, critiques, littéraires, trad. de l’all. par Christophe Jouanlanne et Jean-François Poirier, Paris, PUF, 2000, p. 113.↑
  11. « Rassurance » au lieu de « rassurement », qui est le mot français usuel ; « rassurance » pour évoquer le lien avec la notion d’« assurance sociale » ; réassurance est un terme technique du secteur des « assurances », ce qui est évidemment tout autre chose.↑
  12. Wade Clark Roof, A Generation of Seekers, The Spiritual Journeys of the Baby Boom Generation, January 1994, Harper San Francisco Edition, 304 p.↑
  13. Giovanni Firolamo, op.cit.↑
  14. Piergiorgio Odifreddi, Il vangelo secondo la scienza. Le religione alla prove del nove, Einaudi, Torino, 1999.↑
  15. Ibid., p. 189.↑
  16. HARRIS Sam, La fine della fede. Religione, terrore e il futuro della religione, Nuovi Mondi Media, Bologna, 2006. Voir : The End of Faith: Religion, Terror, and the Future of Reason, W. W. Norton (USA), 2004.↑
  17. CAUSSIMON Jean-Roger, Comme à Ostende, Paris, 1961 ; voir video : Ostende – 1961.↑
Tags : ATEO athée éducation Enrico Nevolo Italie Marco Valdo M.I. religion science

Le Cabinet du Docteur Scalfari

Posté le 17 octobre 2017 Par ABA Publié dans Athéisme Laisser un commentaire
Yves Ramaekers

Le Cabinet du Docteur Caligari est un film célèbre, tourné en Allemagne, il y a près d’un siècle. Dans ce film, on ne sait plus trop à force d’embrouilles qui est le fou de qui ; on arrive difficilement à séparer les affirmations vraies des vrais errements. C’est en référence à ce curieux film que j’ai intitulé cet article « Le Cabinet du Docteur Scalfari », tant les dernières évolutions médiatiques d’Eugenio Scalfari sont brouillonnes au point que dans les interviews où il se délecte à relater ses rencontres avec le pape, on se demande en effet qui est le fou de qui.

Jusqu’en juillet dernier, Eugenio Scalfari était considéré comme un homme dont l’opinion comptait (principalement en Italie) ; il avait la réputation d’un homme libéral, d’un laïc et même, sur foi de ses déclarations, d’un athée. Il était fort connu dans son pays comme un des fondateurs de La Repubblica, un des grands journaux nationaux de ce pays de soixante millions d’habitants ; ce qui n’est pas rien. Il en fut longtemps directeur et rédacteur en chef et il est encore présent dans les colonnes de l’Expresso. Il est important de noter sa position particulière dans le domaine de la presse, car ceci exclut totalement qu’il n’ait pas perçu la portée de ses mots dans ses récentes déclarations.

Dans l’édition de l’Expresso du 19 juillet dernier, Eugenio Scalfari a fait son aggiornamento, son « coming out », comme disent les anglomanes. À cette occasion, il s’est révélé subitement très critique et même carrément insultant et raciste à l’égard des athées, les traitant tout bonnement de chimpanzés. À lire ce qu’il écrivait ce jour-là, on dirait qu’il a été pris d’on ne sait quelle urgence, quelle fulmination, d’on ne sait quelle nostalgie. Comme on va le voir, cette nostalgie est un sentiment puissant qui l’a mené à faire un retour aux sources, à ses sources.

Soyons clair, s’il n’était question que de contredire Scalfari ou de discuter ses arguments, si ce n’était que ça, l’affaire ne vaudrait pas la peine. Mais pour nous – athées – il importe de retrouver la source de cette haine des athées subitement dévoilée et les raisons de ce dévoilement. Autrement dit, il s’agit de mettre au jour les soubassements idéologiques de ce retournement.

Car, c’est indéniable : retournement, il y a. Qui est donc ce vrai Scalfari qui se révèle ainsi ? D’où sort-il cette subite profession de foi ?

Jusqu’à cet étrange article, Eugenio Scalfari était connu pour son athéisme affirmé ; la chose est mille fois attestée au point qu’on le disait « la pointe de diamant » de l’athéisme ; c’est dire son engagement.

Et voilà qu’il déclare sans ambages parlant des athées : « En réalité, [l’athée] c’est un Moi qui ne pense pas… C’est un Moi de nature bestiale… Les athées me rappellent le chimpanzé dont leur espèce provient. »[1]

Outre que ceci va directement à l’encontre de la conception scientifique de l’évolution, l’insinuation du bel Eugenio créerait deux races humaines : celle des athées – Homo sapiens (homme sachant, homme qui sait, homme sage) –, descendant des chimpanzés et celle des croyants – Homo credens (homme croyant) –, la bonne, l’espèce humaine en soi, descendant sans doute d’une autre lignée de primates ou de manipulations divines.

Passons sur le côté médisant ou grotesque de la diatribe du bon Docteur Scalfari. Essayons plutôt de répondre à la question d’Angelo Cannatà dans Il Fatto Quotidiano du 30 juillet dernier : « Qu’est ce qui se passe ? Les rencontres avec le pape causent-elles des changements dans la philosophie de Scalfari ? »[2]

Que Monsieur Scalfari entretienne une amitié particulière avec Monsieur Bergoglio, grand bien leur fasse à tous deux ; mais leurs embrassades, les larmes d’Eugenio à la porte du Vatican[3], le gâtisme des propos échangés par les deux amis, le retour aux sources d’un Scalfari égaré devraient faire l’objet d’une analyse. Que Monsieur Scalfari confesse ses nouveaux enthousiasmes n’aurait rien de bien gênant ; les religieux savent que sur la fin, souvent, certains non-croyants de façade reviennent au bercail et d’aucuns, à la suite d’une rencontre particulière – Dino Segre, alias Pitigrilli, romancier italien à succès avant la guerre, dénonciateur et espion de l’Ovra (la police politique fasciste) à ses heures, finit par se convertir suite à sa rencontre avec Padre Pio. Cependant, il paraît que Bergoglio a refusé la conversion du bon Docteur Scalfari ; le Pape préférait garder son « non-croyant », nous révèle le « laïque » reconfirmé par le Pontife. À voir la suite, on comprend l’homme du Vatican.

Puisque Eugenio Scalfari, l’ami personnel du pape, mais néanmoins laïque et toujours auréolé d’athéisme, a opéré une manipulation, assez jésuitique dans la forme, visant, d’un côté, à créer de « bons athées », c’est-à-dire ceux qui ne critiquent pas les religieux et les religions (respect oblige !) et de l’autre, à isoler ainsi les « mauvais athées » ceux qui soutiennent fermement leur opinion et entendent bien critiquer les religions et se défendre des ingérences des divinités dans la société et accessoirement, de celles de religieux. On reconnaît là une des manœuvres traditionnelles du pouvoir et du conservatisme. En somme, il s’agit tout benoîtement de séparer le bon grain de l’ivraie[4].

Si la fréquentation papale a été fatale à l’athéisme du Docteur Scalfari, on ne s’explique toujours pas la brutale agressivité d’Eugenio Scalfari à l’égard des athées. D’où vient cette hargne, cette aptitude à la haine, cette grossièreté de pensée et d’expression et cet art du mensonge, de la dissimulation, de la médisance et de la calomnie ? Ceci me paraît incohérent avec le personnage officiel, avec l’image posée, rationnelle qu’il donnait de lui-même. Ne serait-ce pas là le nœud de l’affaire du Docteur Scalfari ? Qui est-il réellement et dès lors, d’où vient Eugenio Scalfari ? Quel est son substrat idéologique ? Où donc et dans quelle cornue ont été formées sa pensée et sa culture ? Quels sont ses fondements profonds ? Pour cela, il faut s’interroger sur ses fidélités de jeunesse, sur ses sources résurgentes. En bref, dans quel moule a-t-il été formé ? Et là, on découvre le pot aux roses. Le mieux est de le laisser parler :

À l’hiver 1943, j’étais encore fasciste… Et j’étais content de l’être, entre les mythographies impériales, l’uniforme lictoriel qui plaisait aux filles, le travail journalistique à Roma Fascista. Si… on ne m’avait pas chassé, j’aurais vécu le post-fascisme en fasciste[5].

Roma fascista ! Il en était même le rédacteur en chef ; à ce niveau-là, quand on est jeune, on a des convictions. Évidemment, par la suite, il lui a fallu s’accommoder du monde, il lui a fallu louvoyer, il lui a fallu changer de cap, et il en changea souvent. Au fil du temps, on le retrouva successivement au Parti Libéral, puis au Parti radical, puis au Parti Socialiste, où il sera même député.

Que disait Benedetto Croce, philosophe libéral, rédacteur du Manifeste des intellectuels antifascistes (1925), à propos du fascisme, tel qu’il figurait dans le Manifeste fasciste auquel il donnait une réponse circonstanciée et solidement argumentée :

En quoi pourrait bien consister le nouvel évangile, la nouvelle religion, la nouvelle foi, on n’arrive pas à le savoir au travers des mots de son manifeste verbeux ; et, d’autre part, le fait pratique, en sa muette éloquence, montre à l’observateur objectif un incohérent et bizarre mélange d’appels à l’autorité et de démagogisme, d’un respect proclamé des lois et de violation des lois, de concepts ultramodernes et de vieilleries moisies, d’attitudes absolutistes et de tendances bolchéviques, de mécréance et d’avances à l’Église catholique, de manifestations d’horreurs à l’égard de la culture et d’efforts stériles vers une culture dépourvue de ses prémisses, de pâmoisons mystiques et de cynisme[6].

Outre l’incohérence fondamentale de l’idéologie que dénonce Benedetto Croce et cette aptitude du fascisme à mêler (idéologiquement et mentalement) l’eau et le feu, j’attirerai l’attention sur ce mélange spécifique que relevait le philosophe napolitain de « mécréance et d’avances à l’Église catholique » ainsi que sur le fâcheux penchant à l’opportunisme du mouvement fasciste. Tel était le moule dans lequel se forma le jeune Scalfari. L’exemple venait de haut où Mussolini le « révolutionnaire » s’est fait ministre du Roi, le pacifiste intransigeant a prôné et fait la guerre et l’« athée » a signé les accords du Latran. C’est cette manière de se plier aux circonstances, de faire la révérence à la puissance afin de se mettre soi-même en scène comme protagoniste essentiel qu’on retrouve – bon sang ne saurait mentir – chez le Docteur Scalfari.

Relativement au chimpanzé, on commencera par rapporter la réponse assez verte de l’UAAR, qui est l’Union des Athées italiens, laquelle loin d’adresser des reproches à Scalfari, tout au contraire, le remercie en ces termes :

À compter d’aujourd’hui, nous changeons de nom : nous ne serons plus l’Union des Athées et des Agnostiques Rationalistes, mais l’Union des Orangs-outans et des Chimpanzés. Toute notre reconnaissance à monsieur Eugenio Scalfari pour nous avoir éclairés à propos de notre vraie nature[7].

Quant à moi, j’ajouterai toujours à propos du chimpanzé et à son ascendance commune avec l’être humain que toute la biologie contemporaine nous assure qu’il n’y a aucun doute possible à ce sujet : l’homme a bien un ancêtre commun avec le chimpanzé comme avec tous les animaux, tous les êtres vivants de la planète ; toute la science génétique l’établit. Ceci m’amène à retourner l’argument au Docteur Scalfari et lui faire remarquer que son racisme à l’égard des athées l’entraîne sur une voie glissante. Si l’Homo credens n’a pas d’ancêtre commun avec le chimpanzé et pour faire bonne figure, ajoutons-y l’orang-outan, le chat, la libellule et la bactérie, quelle serait en ce cas la situation ascendante du croyant (entièrement assumé ou caché, crypto-croyant) : de qui, de quoi descendrait-il ? Il est vrai que pour les croyants des religions du Livre, il y aurait Adam et Ève et in fine, Dieu lui-même. On voit à quelles absurdités mènent les affirmations du Docteur Scalfari.

À propos de la découverte d’une nouvelle race humaine par le Docteur Scalfari

Dans Le Conte des trois Chimpanzés, Jared Diamond, professeur et auteur étazunien, raconte beaucoup de choses à propos de l’histoire « humaine », et notamment, il admet qu’on puisse considérer l’homo sapiens comme un chimpanzé – c’est le « troisième chimpanzé » ; nous admettrons cela avec lui.

De plus, il écrit ceci :

D’après les règles de la nomenclature zoologique, puisque le nom de notre genre, Homo, a été proposé en premier, il possède la priorité sur le mot Pan, qui a été attribué aux deux autres chimpanzés. Par conséquent, il n’y a pas une seule espèce du genre Homo sur la Terre aujourd’hui, mais trois : le chimpanzé commun, Homo troglodytes ; le chimpanzé pygmée, Homo paniscus et le troisième chimpanzé ou chimpanzé humain, Homo sapiens. Puisque le gorille n’est que légèrement différent, il a également le droit d’être considéré comme une quatrième espèce d’Homo[8].

Il nous faut dès lors reconsidérer ceci en tenant compte de l’approche proposée par le Docteur Eugenio Scalfari et y intégrer, une autre espèce d’Homo, celle de l’Homo credens, c’est-à-dire celle d’un chimpanzé humain croyant, qui aurait divergé de l’arbre commun aux « Homos » : chimpanzés, gorilles compris.

Rappelons que le Docteur Scalfari avait émis l’hypothèse que l’Homo sapiens aurait une ascendance commune avec les chimpanzés ; ce qui est exact ; cette branche de l’Homo serait constituée des athées. Par un raccourci saisissant, le bon Docteur avait même indiqué que les athées provenaient des chimpanzés.

Il ne s’était cependant pas aperçu qu’en faisant des athées des Homo sapiens, il créait une nouvelle race d’Homo, celle qui serait constituée par les non-athées, c’est-à-dire les croyants, qu’il faut bien baptiser du nom d’Homo credens. Jusque-là, tout est clair. La question se pose alors de savoir ce qui sépare ces deux races, toutes deux biologiquement très proches et de ce fait, par parenthèse, proches de celle du chimpanzé ?

On sait que ce qui différencie l’athée (Homo sapiens) du non-athée (Homo credens), aux dires de ce dernier, c’est la foi.

Certes, mais on sait aussi que comme l’enseignent les éminents biologistes, les différences entre les races sont déterminées par une ou plusieurs différences sur le plan génétique. Alors, qu’en est-il sur le plan génétique ? On devrait trouver un gène de la foi, qui marquerait la différence irréductible entre Homo sapiens et Homo credens.

Cependant, quant au reste, les deux races ne sont pas suffisamment éloignées (génétiquement parlant) pour ne pas pouvoir, par exemple, copuler ensemble et même, engendrer une descendance qui serait forcément hybride – ce qui expliquerait la virulente condamnation par les diverses religions des mariages mixtes entre Homo sapiens et Homo credens.


Notes

  1. http://espresso.repubblica.it/opinioni/vetro-soffiato/2017/07/19/news/atei-militanti-perche-sbagliate-1.306444 ↑
  2. http://temi.repubblica.it/micromega-online/scalfari-ora-devi-spiegare-ai-lettori-cosa-pensi-degli-atei/ ↑
  3. http://www.repubblica.it/vaticano/2017/07/08/news/scalfari_intervista_francesco_il_mio_grido_al_g20_sui_migranti_-170253225/ ↑
  4. https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Bon_Grain_et_l%27Ivraie ↑
  5. http://www.repubblica.it/politica/2016/05/29/news/referendum_1946_scalfari-140836071// ↑
  6. Voir le texte en italien : Manifesto delli intellettuali antifascisti, Il Mondo, 1° Maggio 1925. ↑
  7. Caro Scalfari, davvero gli intolleranti siamo noi atei? (Cher Scalfari, vraiment, nous serions, nous les athées, les intolérants ?) ↑
  8. Le Troisième Chimpanzé : Essai sur l’évolution et l’avenir de l’animal humain (titre orig. The Third Chimpanzee: The Evolution and Future of the Human Animal), Folio, Gallimard, 2015, 698 p, pp. 51-52. ↑
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Mort et résurrection de l’athée

Posté le 17 octobre 2017 Par ABA Publié dans Athéisme Laisser un commentaire
Marco Valdo M.I.

La Libre Belgique a publié cet été 2017 une série de 5 articles intitulée : « Être athée aujourd’hui » qui envisage l’athéisme dans divers pays : la Roumanie, l’Iran, l’Inde, le Brésil, les États-Unis.

Elle devait comporter un sixième article. Nous ajouterons l’Italie.

En marge, la Libre Belgique parle de la « non-croyance», imaginant mieux qualifier l’athéisme ; un peu comme si pour préciser ce qu’est une poule, je disais une « gallinacée ».

La non-croyance ou l’athéisme est la façon dont les « non-athées » définissent dans leur étrange langage ceux qui n’envisagent pas la nécessité d’un dieu d’une croyance ou d’une religion.

Le terme « athée » lui-même est impropre ; pour nier l’existence de quelque chose (ici, une croyance, un dieu, etc.), encore faut-il que cette chose existe préalablement. Or, il est évident – même pour nos bons croyants, sinon à quoi servirait le baptême – que l’être humain naît sans croyance aucune et dès lors, sans aucun dieu, on naît tous athées.

Un athée pourrait affirmer :

Je suis athée, car je crois au Dieu Athée qui me dit qu’il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu et que Dieu est athée et que l’homme naît athée et doit le rester.C’est donc par la volonté du Dieu Athée que je suis moi-même athée.Et allez prouver que c’est faux.

On ne s’attardera pas ici à dénombrer les athées à travers le monde. Disons simplement qu’il y en a beaucoup et que si dans les pays religieux, les croyants et les religieux ne menaçaient pas de mort les athées, si la chasse aux sorcières n’était pas ouverte en permanence, si le fait de se déclarer athée n’était pas l’objet de rétorsions, si dès lors, on n’était pas contraint de simuler le ralliement à un culte quelconque, si on enseignait partout et à tous la raison, le savoir et la démarche scientifique, on se demande ce qui resterait des croyances et de croyants.

D’un point de vue évolutionniste, même si les pays où sévissent les religions natalistes voient le nombre de leurs habitants croître, à terme, au fur et à mesure que l’homme prendra la mesure de l’homme sans s’encombrer d’un inutile créateur, les religions disparaîtront. Humains, encore un effort ! [1]

Voyons maintenant, ce que racontent ces articles et ce qu’on peut en penser en tant qu’athée.

La cathédrale du Salut de la Nation et le prêtre dévêtu de sa soutane

En Roumanie – comme en Russie, en Grèce, dans certains pays des Balkans – l’Église orthodoxe est dominante et pèse sur la société civile et politique. La journaliste Maria Udrescu, elle-même roumaine, avec un courage qu’il faut saluer, a levé le voile qui occultait les manœuvres ecclésiastiques. Elle entame son reportage[2] par le scandale de l’édification sur un terrain de l’État d’une titanesque « cathédrale du Salut de la Nation ». Le nom et le projet qu’il recouvre en disent long sur l’état de l’État roumain, le pouvoir de l’Église et la situation de la Roumanie.

Les argents consacrés aux églises roumaines et à cette cathédrale s’élèvent à des milliards d’euros alors qu’on ne trouve pas d’argent pour construire des hôpitaux. Ces faits défrisent bien des citoyens et « cela risque à terme, de refroidir les politiciens à faire les poches de l’État dès que l’Église tend la main ». Dans ce pays où l’orthodoxie est en odeur de sainteté, les Roumains ne seraient plus que 60 % à se réclamer du culte.

Cependant, bien que la Roumanie se définisse constitutionnellement comme un État laïc ou « neutre », on en est toujours au XIXe siècle, époque où les Églises garantissaient les identités nationales. De ce fait, les athées sont accusés d’être des anti-Roumains.

Des groupes religieux se sont fédérés pour créer une « Coalition pour la famille » pour réclamer une modification de la Constitution imposant le mariage bisexué, autrement dit – exclusivement – entre un homme et une femme. On sait que ce n’est pas un phénomène propre à la Roumanie et que ce sont les plus rétrogrades des « fidèles » et les gens les plus réactionnaires qu’on retrouve dans ces mouvements, suscités par le clergé.

Par ailleurs, même si l’empire de l’Église sur les populations est puissant, il est en recul constant et on a publié en mai dernier un livre intitulé La confession d’un prêtre athée, dont l’auteur Ion Aion est un religieux qui s’était « dévêtu de sa soutane ».

Roumains, encore un effort !

Il s’agit d’être bien avec l’Islam

Le deuxième pays visité par La Libre Belgique est l’Iran et l’article[3] est dû à la plume de Vincent Braun, lequel note qu’« il ne fait pas bon d’être athée en Iran », car chez les chiites d’Iran, on ne badine pas avec la fidélité au Coran et à Allah. C’est un pays où on est athée en quelque sorte « sous le manteau » ; on ne révèle son athéisme qu’en privé ou sous l’anonymat d’Internet, car en Iran, la sanction de l’athéisme est la mort. On ne saurait douter de l’existence de Dieu, ni tolérer un tel doute. Il n’est pas question de publier des informations sur l’athéisme ; c’est considéré diffamatoire vis-à-vis du prophète et du régime.

Si nombre d’Iraniens ne sont pas croyants, ils le sont clandestinement et affichent une croyance et une conduite de façade. Il s’agit d’être bien avec l’Islam, si on veut obtenir un emploi. Si on veut vivre, également.

L’apostasie est le pire des crimes et est punie de mort. Soit, mais en Iran, où tous sont censés être musulmans (on tolère quelques chrétiens, juifs ou zoroastriens ou parsis), le simple fait d’être reconnu athée est létal.

Après des années de société islamique, une certaine désaffection se fait jour dans l’esprit des Iraniens et certains vont jusqu’à douter de l’existence de Dieu ; mais tous ne le disent pas. On décèle là-bas un peuple d’« athées cachés ».

Iraniens, encore un effort !

Pour vivre athées, vivons cachés

Le troisième pays visité par La Libre Belgique est l’Inde et le compte rendu[4] paraît sous la signature d’Emmanuel Derville, qui professe à New Delhi. Que dit-il ?

Il raconte l’histoire de Narendra Dabholkar, un athée assassiné, qui menait le combat contre la superstition au sein d’une association dont tous les membres sont athées. « Notre objectif est d’encourager les gens à penser par eux-mêmes… ». Objectif louable, mais la chose n’est pas du tout du goût des fondamentalistes hindous, qui ont des relais politiques jusqu’au sommet de l’État et les assassinats d’athées se multiplient et nous renseigne Emmanuel Derville : « les fondamentalistes considèrent la violence comme un moyen légitime de promouvoir leurs idées. » C’est une version musclée du classique de la propagande : « Enfoncez-vous bien ça dans la tête ! »

En Inde, comme ailleurs, le trop relatif anonymat d’Internet est un piège pour les athées ; témoin ce père (31 ans) qui avait publié sur un réseau social une photo de son fils brandissant une pancarte disant : « Dieu n’existe pas ! ». Ce brave homme, fier de son enfant, fut poignardé à mort.

Quant aux athées qui vivraient en Inde, nul ne sait combien ils sont. Les sondages ne sont que d’un médiocre secours ; ils ne révèlent que ce que les sondés acceptent de laisser transparaître et tout le monde n’a pas vocation au martyre, surtout chez les athées. Pour vivre athée, vivons cachés est une devise de prudence.

Pour le reste : Indiens, encore un effort !

Les politiciens courent derrière les religieux qui courent derrière les fidèles

Poursuivant son tour des pays malades de la religion, La Libre Belgique s’est intéressée au Brésil par l’entremise de sa correspondante de Rio de Janeiro, Morgann Jezequel[5]. Le Brésil est le premier pays catholique du monde par le nombre de baptisés et en même temps, un pays de mission protestante intensive, un lobby évangélique, une vraie force politique. Il y a là un affrontement entre les religions et pourtant, face aux athées, les concurrents religieux se regroupent dans la plus stricte condamnation.

Eduard Luz, un des rares politiciens à avoir osé affirmer son athéisme dit qu’« on assiste à un dangereux mélange des genres entre politique et religion ». Les politiciens courent après les religieux qui courent après les fidèles pour mobiliser ces électeurs potentiels.

Le schéma brésilien est semblable à celui d’autres pays d’Amérique latine où les athées sont vilipendés et mis à l’écart. Le phénomène est perceptible jusque dans la recherche universitaire où il y a plus de recherches consacrées à la non-pratique religieuse (sans doute importe-t-il de comprendre comment redynamiser le troupeau égaré) qu’à l’athéisme.

Mais quand même en 2016, si cinq Brésiliens sondés sur six sont liés à une religion ou une secte chrétienne, on note une forte progression des sans-religion. Cela dit, on ne peut avoir d’estimation réaliste du nombre d’athées « cachés » ; la résistance à l’oppression est toujours essentiellement clandestine.

Alors, Brésiliens encore un effort !

La ceinture biblique des États-Unis

Les États-Unis n’en finiront pas d’étonner le monde ; La Libre Belgique publie un deuxième article[6] de Maria Udrescu consacré à cette grande nation, qui se veut chantre de la liberté et qui ne s’est pas encore dégagée des liens de la croyance. Un de ses présidents avait résumé l’affaire en disant : « Peu importe en quoi on croit, du moment qu’on croit en quelque chose ». Un citoyen, initié à l’évangélisme par un collègue pieux, conclut de ses lectures attentives de la Bible (the Book) : « L’absurdité de la religion était si évidente pour moi… » ; une déclaration qui lui valut (presque) la rupture avec son frère lequel exerce le délicat ministère de pasteur. Le même citoyen assure que : « Dans certaines villes, ne pas croire en Dieu… Tout le monde s’en fout. Mais dans la Bible Belt, cela peut détruire votre vie. » « La Bible Belt, dit notre citoyen, est le terreau du fondamentalisme ». Bible Belt se traduit par « ceinture biblique ». On pourrait la comparer à une « ceinture de chasteté religieuse » ; elle regroupe les États du Sud, les plus croyants du pays, les sécessionnistes, les partisans de l’esclavage, puis, de la discrimination raciale ; au-dessous de la « ceinture biblique », c’est le paradis des créationnistes et des missions d’évangélisation qui se répandent dans le monde. On y rejette l’idée d’évolution ; on va jusqu’à en interdire l’enseignement. Là, les athées ont l’impression de vivre en état de siège ; là-bas, ils sont inéligibles et ceux qui ne croient en rien sont ostracisés.

Au niveau national, les politiciens se montrent à l’église, invoquent le Seigneur et rivalisent de prières et de citations du Livre afin de démontrer leur attachement à la foi des électeurs. On rapporte que dans l’histoire du Congrès, un seul représentant s’est déclaré ouvertement athée. Dans les milieux scientifiques, l’athéisme est très largement partagé ; on cite des chiffes qui approchent ou dépassent les 90 % d’incroyants.

On retiendra l’image d’un pays gangrené par la croyance, sauf dans les grandes villes où l’athéisme, et l’athéisme caché, progressent en même temps que le niveau général d’éducation, lié à la diffusion du savoir scientifique. C’est là que s’exprime l’athéisme étazunien.

Étazuniens, encore un effort !

Conclusion à l’italienne : de la nécessité de défendre les droits des athées

Pour terminer, voici un article[7] de Giovanni Gaetani, publié par l’Uaar[8], qui fait le point sur la situation en Italie. Il s’agit d’une réflexion autour de thèmes qui touchent à la vie des athées, d’une réfutation de lieux communs concernant la situation des athées.

Un lieu commun, c’est que « chez nous », il n’y a plus de discrimination vis-à-vis des athées. Ce sont des propos qui disent que « la société italienne serait désormais ouverte vis-à-vis des athées », l’État « substantiellement » laïque et l’Église aurait perdu son pouvoir hégémonique, grâce au « progressisme » du « pape rebelle », qu’on n’aurait plus besoin d’association athée, puisqu’en Italie, les athées sont « finalement » libres de vivre comme il leur semble. (Question : pour la même raison, aurait-on encore besoin de l’Église ?)

Mais, dit Gaetani, les droits et les libertés des athées ne sont pas tombés du ciel (ni du progressisme du pape rebelle), mais sont le résultat d’un long combat. De plus, il n’est pas vrai qu’on est libre de vivre comme on veut, car il est des discriminations cachées dans les plis du quotidien et si on ne s’en aperçoit pas, c’est par une sorte d’« assuétude » imposée dès l’enfance comme normale, intangible, impossible à mettre en discussion, ce sont des préjugés enracinés en nous et qui nous font accepter des comportements et des mécanismes légaux qu’autrement, nous considérerions comme absurdes et discriminatoires : les crucifix dans les classes et les lieux publics ; l’enseignement de la religion catholique dans les écoles par des professeurs choisis pas le Vatican, mais payés par l’État ; la subsidiation de l’Église ; le favoritisme fiscal au profit de l’Église ; l’ingérence de l’Église dans l’agenda politique ; l’appel à la tradition religieuse pour discriminer les citoyens sur base de leur orientation sexuelle ; les droits des femmes et notamment, le droit à l’avortement piétiné et humilié au nom des droits des gynécologues catholiques à l’objection de conscience. Et la liste pourrait encore être longue.

Pour tous ces motifs et contre toutes les attaques qui les frappent dans le monde, au nom des athées assassinés, de tous les athées « cachés », il serait insensé de penser que « désormais » les athées n’ont plus de revendications. Dès lors, face aux religieux, aux religions, pour les athées, en Italie comme ailleurs : Ora e sempre : Resistenza ! (Maintenant et toujours : Résistance !)

Italiens, encore un effort !


Notes

  1. C’est évidemment plus qu’une allusion au magnifique texte de Donatien Alphonse François de Sade, « Français, encore un effort si vous voulez être Républicains : la religion », in La Philosophie dans le boudoir, 1796. ↑
  2. Maria Udrescu, « En Roumanie, l’athéisme est associé au communisme et au satanisme », « Être athée aujourd’hui, 1/5 », La Libre Belgique, 8 août 2017, pp. 16-17. ↑
  3. Vincent Braun, « En Iran, les athées risquent la peine de mort », « Être athée aujourd’hui, 2/5 », La Libre Belgique, 9 août 2017, pp. 20-21. ↑
  4. Emmanuel Derville, « En Inde, les athées confrontés aux radicaux hindous », « Être athée aujourd’hui, 3/5 », La Libre Belgique, 10 août 201, p.18. ↑
  5. Morgann Jezequel, « Au Brésil, l’athéisme demeure une tare », « Être athée aujourd’hui, 4/5 », La Libre Belgique, 11 août 2017, p.18. ↑
  6. Maria Udrescu, « Aux États-Unis, la religion reste un gage de moralité », « Être athée aujourd’hui, 5/5 », La Libre Belgique, 12-13 août 2017, pp. 18-19. ↑
  7. Gaetani Giovanni, « Perché mai dovremmo difendere i diritti degli atei? » (Pourquoi devrions-nous défendre les droits des athées ?), https://blog.uaar.it/2017/08/22/perche-dovremmo-difendere-diritti-atei/ ↑
  8. UAAR, Unione degli Atei e degli Agnostici Razionalisti, https://www.uaar.it/uaar/ ↑
Tags : athéisme Brésil États-Unis Inde Iran Italie religion Roumanie

L’Italie, colonie du Vatican

Posté le 16 juillet 2017 Par ABA Publié dans Anticléricalisme Laisser un commentaire
Garibaldi devant Rome

Garibaldi devant Rome

Lucien Lane

Suite aux Accords du Latran et au Concordat signés en 1929 par Mussolini avec le Vatican, l’Italie était devenue une colonie du Vatican.

Garibaldi se retournait dans sa tombe.

En 1948, à la création de la République italienne, après la chute du régime fasciste, ces accords furent introduits dans la Constitution du nouvel État.

Garibaldi se retournait une fois encore.

En 1984, le gouvernement Craxi modifia la donne et mit fin aux effets dommageables du Concordat.

Où en est-on aujourd’hui ?

La question est complexe et la réponse simple : l’Italie est toujours une colonie du Vatican.

Garibaldi se tourne et se retourne… Quand sera-t-il enfin libéré de ce cauchemar ?

La Saint-Valentin à l’italienne

Cette année, on a fêtéc entre officiels vaticanesques et italiens – cet événement le 14 février, jour consacré à la Saint-Valentin et aux amours conjugaux ou illicites, quand on en connaît.

On avait récemment publié ici un article circonstancié intitulé « L’Athée et la Constitution ou la Trahison des Clercs en Italie »[1] dans lequel on faisait place à l’analyse de Piero Calamandrei, écrivain, juriste et homme politique italien, membre de l’Assemblée constituante. Il s’agissait d’une analyse relative à l’introduction des Accords du Latran, dans la Constitution italienne par le biais de l’article 7 – en une sorte de coup d’État rampant que Calamandrei fut parmi les premiers à dénoncer.

Piero Calamandrei présageait une évolution désastreuse pour la République italienne. Le temps ne lui a certes pas donné tort.

Revendications laïques – 2017

En Italie, des voix s’élèvent pour exiger une « révision du Concordat » et la remise en cause de cette monstruosité qu’est l’État du Vatican.

Mardi 14 février (2017), à partir de 16 heures, devant l’Ambassade d’Italie près le Saint Siège (une ambassade d’Italie en plein cœur de l’Italie ; absurde n’est-il pas ?), viale delle Belle Arti, 2, s’est déroulée la rencontre annuelle entre les représentants du gouvernement italien et les hauts représentants du Vatican pour « célébrer » l’anniversaire des Accords du Latran et du Concordat (« le baiser à la pantoufle »)[2].

Les Radicaux italiens et de nombreuses associations laïques ont donc organisé – ce même jour de Saint-Valentin 2017 au même endroit (mais devant le bâtiment) – une manifestation pour réclamer de l’État italien de :

  • revoir la norme du 8 ‰, qui donne à l’Église catholique plus d’un milliard d’euros par an ;
  • obtenir le payement de l’IMU par l’Église catholique – il s’agit de la taxe immobilière sur les biens ecclésiastiques : deux milliards d’euros par an ;
  • garantir des activités alternatives aux élèves qui demandent à être exemptés de l’heure de religion.

Les Accords du Latran

Les Accords du Latran avaient été un mirifique cadeau de Saint-Valentin fait par Mussolini à son amante religieuse. Ces Accords ne scellaient pas une rencontre d’amour, mais un mariage de dupes, sur le dos de la population italienne.

Par ces accords, la partie de bras de fer entre l’État italien et l’Église catholique, qui durait depuis 1870, se terminait par une victoire de l’Église vaticane qui reconquérait l’essentiel de ce qui avait été perdu lors de l’épisode de la Porta Pia, qui vit l’armée italienne abattre – le 20 septembre – la muraille d’enceinte de Rome, créant une brèche dans les fortifications, reprendre la Ville, abolir le pouvoir temporel des Papes et récupérer les États pontificaux.

Les Accords de 1929 stipulent que la prise en charge de ces frais avait été accordée « comme dédommagement de la fin du pouvoir temporel du pape lors de l’annexion de Rome au Royaume d’Italie après l’épisode de la Porta Pia de 1870 », mettant un terme à la « question romaine ».

L’Église catholique se voyait attribuer de nouveaux avantages substantiels et renforçait sa position.

Les Accords du Latran imposaient à l’Italie :

  1. la reconnaissance de la religion catholique comme unique religion d’État ;
  2. l’enseignement obligatoire de la religion (exclusivement catholique) dans les écoles publiques italiennes. Par obligatoire, il faut comprendre le double sens de ce mot : il y a pour l’école publique l’obligation de donner un cours de religion strictement catholique, mais aussi l’obligation d’imposer à tous les élèves la présence à ce cours ;
  3. le payement des émoluments des prêtres (catholiques exclusivement) – le tout à charge de l’État.

En droit, on parlerait d’un contrat léonin ; un type de contrat où une partie est manifestement lésée (en l’occurrence, l’Italie) et, en bon droit, l’Italie pourrait de ce fait légitimement en demander la résiliation.

1929 – Le donnant-donnant

Qu’avait lâché Mussolini (représentant l’État italien fasciste et le Royaume d’Italie) dans cette partie de donnant-donnant avec l’Église catholique et la papauté ?

Quelle concession avait-il dû faire (comme devra le faire presque vingt ans après, Togliatti, secrétaire général du PCI – Parti Communiste Italien) pour avoir une entente avec la vieille institution catholique ?

Il échangeait donc la neutralité (relative) de l’Église catholique à l’égard du fascisme contre le « baiser à la pantoufle », à savoir la reddition au souverain pontife de tout le peuple italien (on effaçait ainsi le
Risorgimento) et sa mise sous tutelle par l’Église catholique pour une durée indéterminée.

On dira qu’il avait échangé le droit à l’indépendance du peuple italien contre un plat de lentilles bibliques.

1948 – La trahison des clercs

En 1948, les démocrates-chrétiens, avec la complicité des communistes, confirmèrent tout cela en l’imposant dans la Constitution du jeune État, via l’article 7, qui dispose :

L’État et l’Église catholique sont, chacun dans son propre domaine, indépendants et souverains. Leurs rapports sont réglés par les Accords du Latran. Les modifications aux Accords, acceptées par les deux parties, ne requièrent pas de révision constitutionnelle.

Et c’est ainsi que l’Italie est devenue un Catholikistan.

1984 – La Révision manquée

En 1984, sous la conduite du socialiste Bettino Craxi, président du Conseil, il y eut une révision qui aurait pu arranger (partiellement) les choses.

Cette révision entraîna la disparition des trois points les plus controversés :

  • la religion catholique cessait d’être la religion d’État ;
  • l’enseignement de la religion (catholique) devenait facultatif ;
  • le financement des prêtres par toute la population était aboli.

La révision faite, on y mit immédiatement obstacle et en pratique, on ne l’appliqua que très imparfaitement.

Par parenthèse, Bettino Craxi dut fuir l’Italie quelque temps plus tard ; on trouva pour l’exiler d’autres (bonnes ?) raisons.

La conclusion de la révision de 1984 ?

À l’analyse, il se révèle qu’il y eut d’énormes concessions de l’État au profit de l’Église catholique et du Vatican.

Et même plus encore

Ainsi l’Italie, partie lésée, fut obligée de céder des avantages compensatoires encore plus élevés à la partie adverse – l’Église catholique.

Par exemple, et ce n’est pas exhaustif :

  • l’introduction de l’enseignement de la religion catholique dans les écoles maternelles ;
  • le passage à deux heures de religion catholique à l’école primaire (au lieu d’une seule précédemment) ;
  • le traitement « équivalent » (« équipollent ») à celui des écoles de l’État pour l’Enseignement catholique (privé) – en clair, le financement de l’enseignement catholique ; alors que la Constitution italienne prévoit la possibilité d’un enseignement privé, mais elle précise bien « sans coût pour les pouvoirs publics » ;
  • la reconnaissance de la « culture religieuse » et du catholicisme comme « patrimoine historique » (à quand un musée des conversions forcées, des bûchers et de l’Inquisition ?) ;
  • le financement de la construction et de l’entretien du « patrimoine religieux » par l’État ou les pouvoirs publics en dépit du fait que la propriété des biens en question a été rendue à l’Église par la même révision ;
  • l’extra-territorialité qui protège les membres de l’Église catholique ;
  • l’exemption des taxes sur les biens (IMU), mais aussi de la TVA sur les activités, y compris commerciales, de l’Église catholique et sur les dons faits à celle-ci ;
  • les privilèges accordés aux banques vaticanes.

La discrimination des non-catholiques est anticonstitutionnelle

Toutes ces concessions à l’Église catholique vont à l’encontre de la séparation de l’État par rapport aux religions (au pluriel) et surtout, à l’encontre de l’égalité entre tous les citoyens. Ce pour quoi, elles sont anticonstitutionnelles.

En effet, l’article 3 de la Constitution italienne stipule :

Tous les citoyens ont une égale dignité sociale et sont égaux devant la loi, sans distinction de sexe, de race, de langue, de religion, d’opinions politiques, de conditions personnelles et sociales.

Il est clair que ces concessions instituent ou perpétuent un grave déséquilibre au détriment des citoyens qui ne se réclament pas de La religion catholique.

Il y a là une situation de discrimination qui dans certaines de ses dispositions vont jusqu’à la mise au ban des athées et des autres citoyens non-catholiques.

La religion d’État et la diffusion virale des catholiques dans les partis

En Italie, la religion catholique continue à être pratiquement la « religion d’État » dans l’esprit et les comportements de la classe politique, qui reprend fidèlement en écho les exigences et les veto des autorités vaticanes.

En Italie, à présent et depuis de longues années, les politiciens de tendance catholique sont omniprésents et influents quasiment dans tous les partis et même au sein du plus grand parti de la gauche parlementaire, à savoir le PD, sigle pour le Parti Démocratique. Il n’y a quasiment plus de parti qui se proclame laïque et anticlérical et plus de politicien qui se déclare athée.

Fin de la Démocratie chrétienne

De son côté, le grand parti de la Démocratie chrétienne, qui avait dominé l’Italie de l’après-guerre pendant près de trente ans, a disparu du paysage politique italien et infiltré les autres partis.

On peut supposer qu’il ne s’agit pas là d’un mouvement fortuit et que cette dissémination virale correspond à une stratégie venue du plus haut, lequel « plus haut » doit s’être dit deux choses :

  • à force de durer au pouvoir, la Démocratie chrétienne perdait de sa crédibilité et tendait un peu trop à s’autonomiser.
  • pour contrôler l’ensemble de l’échiquier politique, il est prudent et d’un meilleur rendement de ne pas avoir tous ses œufs dans le même panier.

La Chaire ne suffit plus pour porter le message

Une autre forme d’ingérence vaticane, c’est la présence lourde et massive de l’Église catholique dans l’Italie d’aujourd’hui ; elle se fait voir et entendre quotidiennement dans et par les médias.

Historiquement, l’Église était à peu près le seul grand média dans la mesure où elle disposait du plus grand réseau de diffusion qu’étaient les chaires de ses églises et les prêches de ses officiants. Mais depuis longtemps, d’autres réseaux plus tonitruants se sont mis en place.

Il s’agissait donc d’user de techniques plus contemporaines, de procéder à un
aggiornamento, de mettre la main sur les médias ou de les amener à relayer la parole divine et celle de ses serviteurs.

Qu’en est-il sur le terrain ?

En tout premier lieu, on note l’omniprésence de l’Église, de ses messages et de ses représentants dans quasiment tous les programmes de la RAI – une radiotélévision (soi-disant) de Service public – mais c’est aussi le cas dans les radiotélévisions privées. Il en va de même de la presse qui pour l’essentiel se conduit en agence publicitaire de la catholicité.

L’enseignement de « La religion »

Dans les faits, l’enseignement de la religion catholique est toujours obligatoire en raison de la politique du ministère de l’Éducation
(Pubblica Instruzione), qui ne fait rien pour remplacer le cours d’endoctrinement religieux.

Pour les élèves qui demandent l’exemption du cours de religion catholique, quasiment rien n’est prévu, de sorte que la plupart du temps, ces enfants passent le temps de ces cours dans le couloir (les veinards !) comme s’ils étaient punis et expulsés de la classe.

Il s’agit là d’une mesure d’ostracisme et de discrimination qui n’a pas lieu d’être dans une école publique.

Que l’État réserve ses faveurs à l’Église catholique est tout aussi nettement visible dans le fait qu’il lui laisse la désignation des enseignants de son choix passant ainsi par-dessus toutes les règles et par-dessus les droits des milliers de jeunes enseignants, maintenus dans des situations précaires en attente d’un emploi.

Telle est la Catholie.

1984 – les nouveaux bénéfices de l’Église catholique

Comme la révision des accords en 1984 risquait de faire mal à la « pauvre » Église catholique, on remplaça immédiatement les aides perdues par le mécanisme du 8 ‰ et on y ajouta une série de bénéfices économiques et fiscaux, pour faire bonne mesure. Le tout « à charge » de tous les citoyens d’Italie, catholiques ou non, d’accord ou non.

Les subtilités du 8 ‰

Le 8 ‰ est un impôt dédié d’une valeur de 0,8 % que le contribuable peut attribuer à certaines institutions ou laisser à l’État, s’il ne spécifie rien. En gros, il suffit de cocher (ou de faire cocher) une case sur la feuille d’impôt.

La majeure partie du 8 ‰ (plus de 80 %) est reversée à l’Église catholique. Le mécanisme est simple et se résume à un véritable tour de passe-passe.

La subtilité qui favorise l’Église catholique (qui attire moins de 35 % du choix global), c’est que ce qui n’est pas spécifiquement dédié doit rentrer dans les caisses publiques, mais est ristourné par l’État aux institutions bénéficiaires prévues par la loi au
pro rata de l’importance de ce qui leur a été dédié. C’est ainsi que 35 % se convertissent en plus de 80%.

L’Église catholique qui quadrille de sa propagande millénaire le territoire, qui investit les médias et qui manipule les contribuables les plus faibles en les « aidant » à remplir leurs déclarations d’impôt, tire une fois encore le gros lot. Et il est énorme : en 2016, environ un milliard d’euros.

Une étude publiée en 2007 montrait que les financements directs ou indirects de l’État et des pouvoirs locaux, la rétrocession à l’Église catholique de la majorité du 8 ‰ et les exemptions de taxes, les salaires des enseignants de religion catholique, le financement des « grands événements » (religieusement encadrés par l’Église catholique) se montaient au total à plus de 4 000 000 000 d’euros par an, soit pour ceux qui se souviennent des francs belges, la bagatelle de 160 milliards par an, soit un pont sur le Détroit de Messine chaque année, soit encore les dédommagements d’un ou deux tremblements de terre.

Et c’était il y a dix ans. Aujourd’hui, ce « budget » a dû plus que doubler ; on parle, en effet, de huit milliards en 2016.

L’Église catholique et l’occupation de l’Italie

Il est un fait qui est rarement noté par les observateurs, c’est la place « physique » de l’Église dans un pays.

Dans le cas de l’Italie, (chiffres de 2000), l’Église catholique y compte plus de 16 500 instituts religieux (comprenons établissements d’enseignement), 27 000 paroisses et environ 16 000 institutions de natures diverses. Il y a donc sur le territoire italien environ 60 000 lieux où l’Église catholique affirme sa présence.

En contrepartie, l’Italie se compose de 7 983 communes.

Que penser de la place de l’Église catholique, comme institution temporelle, physique, occupant ainsi le territoire ?

Tout simplement qu’elle a établi, au cours des siècles, un véritable quadrillage de la société, une toile parallèle à l’organisation administrative du pays, un réseau qu’elle fait financer par les fonds publics, y compris par les citoyens non-catholiques.

Dans les pays démocratiques, aucun parti politique n’a jamais disposé d’une telle imprégnation territoriale.

Sans compter le rôle d’agence de renseignement, de propagande et de persuasion psychologique et mentale que constitue le réseau des paroisses et la pratique un peu particulière de la confession.

Sans compter les crucifix dans les écoles et les lieux publics, les calvaires, les chapelles, les monuments, les cloches, les processions, les bénédictions, les pèlerinages et autres manifestations publiques.

Par ailleurs, un tel maillage et un tel harcèlement, opérés depuis des siècles, ne sont pas sans raison, ni sans effet.

Alors même que les paroisses sont désertées, il s’agit d’occuper le terrain pour saturer les esprits, d’éviter que les citoyens n’oublient les appels à la transcendance.

Les effets sur les gens

Quant aux effets, ils sont considérables pour tous les citoyens. Les conséquences financières colossales (sans compter le recel et l’accumulation de ce qui a été engrangé par le passé), la pression sociale discriminatoire – il y a toujours une église près de chez vous et si vous n’y allez pas au moins pour certaines cérémonies ou circonstances, vous êtes mis à l’écart de ce système communautaire, pointé du doigt et l’objet de toutes sortes de racontars. D’autant qu’en raison de votre mécréance, il y a peu de chance que l’Église catholique puisse capter votre héritage.

C’est une atmosphère étouffante à laquelle il est difficile de se soustraire. Mes biens chers frères…
Big Brother is watching you.

Bref, il y a là un monde orwellien, au plein sens du terme.

Trop, c’est trop !

Trop, c’est trop et pèse fort lourd en ces temps où le pays est en passe de sombrer.

De plus, ce détournement des finances publiques va à l’encontre de deux tendances de la société :

  • le fait que la société italienne s’est largement sécularisée – en français : laïcisée ;
  • le fait qu’en raison du phénomène de l’immigration (5 millions d’immigrés « en règle »), l’Italie devient un pays multiculturel, avec une présence non négligeable d’adeptes d’autres religions.

L’Italie divisée

Quand on examine le mouvement de sécularisation – la laïcisation de l’Italie et le fait que le public des paroisses se réduit au point que les églises ferment–, on peut se demander ce que ça recouvre.

Il y a là une Italie divisée avec d’une part, l’Italie institutionnelle, c’est-à-dire le monde politique et religieux (essentiellement la hiérarchie catholique), très attachée au maintien de l’ordre traditionnel et d’autre part, une Italie civile où les gens ne se reconnaissent plus dans les instances.

Cette confrontation dépasse la simple sécularisation « religieuse » et oppose la société civile en évolution (les gens, le commun, le peuple…) à la structure politico-religieuse, que les gens appellent le « système » ou la « caste ».

Pour contredire la propagande du « système », d’autres voies se sont ouvertes pour véhiculer l’information libre et pour animer la société civile. Ces voies de résistance se développent en dehors des médias « traditionnels » dans le champ culturel et social et sourdent par tous les canaux et sous toutes les formes possibles – associations, rencontres, concerts, groupes musicaux, chansons, théâtres, centres sociaux, radios libres, Internet (sites, blogs), articles, journaux, livres…

Les ingérences vaticanes

Quant aux ingérences vaticanes dans les affaires italiennes, le commentateur Carlo Troilo déclare : « la liste des “ingérences” serait malheureusement infinie ».

Cependant, on peut tirer une indication d’une aussi énorme pénétration catholique : l’Italie est une colonie vaticane, une sorte de province perdue qu’il convient de garder sous tutelle. Le commentateur précise :

Ces ingérences et la faiblesse de notre classe politique sont la cause première de l’arriération sur le plan des droits civils de notre pays, maillon noir de l’Europe. Il suffit de penser à l’effort inhumain qu’il a fallu faire pour arriver à mettre au jour une loi décente sur les unions civiles […], ou à la bataille qui commence seulement à présent au Parlement, non pour légaliser l’euthanasie – proposition renvoyée à une date indéterminée – mais pour obtenir au moins une loi sur le testament biologique.

Bergoglio, les mots et les faits

On ne peut nier que le pape Bergoglio fasse l’objet – et pas seulement en Italie – d’une perpétuelle séance de frotte-manche, de cirage de pompes et de laudations
ad hominem. C’est à qui lustrera le mieux le parquet où se pose la pantoufle. Au-delà de tous ces panégyriques et de ces dithyrambes, qu’y a-t-il vraiment ?

Reprenons l’erre de notre Virgile, alias Carlo Troilo.

Au début du pontificat, le pape argentin sembla apporter un air nouveau, déclarant sa ferme volonté de ramener de la moralité dans un Vatican secoué par les scandales et en assumant des positions courageuses sur les maux du monde, la misère, le drame des immigrés.Même sur les thèmes sensibles, Bergoglio semblait vouloir innover (son « qui suis-je pour juger ? », à propos des homosexuels).Le problème est que trop souvent le pape n’a pas la capacité de donner une suite concrète à ses annonces retentissantes.

Le discours utile

Il est une hypothèse plus crédible. Sachant que le pape est d’abord un homme d’État, il existe une possibilité logique conforme à la tradition ecclésiastique : celle du discours démagogique volontaire, du mensonge utile, de la parole de propagande.

Il y a derrière tout ça près de deux millénaires d’une expérience madrée et le fait qu’un pape est la figure de proue d’un vaisseau lancé à la conquête du monde des humains, à commencer par l’Italie, puisqu’il (et l’Église catholique) y demeure.

Le pape jésuite

Il convient ici de se souvenir que l’actuel Pontife est le premier pape jésuite et en tant que tel un combattant du Christ, formé à certaine gymnastique mentale et morale.

Ainsi, aux dires de notre commentateur italien :

Dans les rapports avec l’État italien, Bergoglio s’était engagé à ne pas intervenir en personne, mais ensuite, il laissa aux Cardinaux le soin de parler et d’attaquer avec force les lois non conformes. Et les Cardinaux ne se sont pas fait prier […]. Parfois, toutefois, le pape ne peut se retenir et « descend dans l’arène », condamnant sans appel l’avortement (et incitant à l’objection de conscience), les unions civiles, la théorie du « genre », qui aux dires du pape serait « une guerre mondiale pour détruire le mariage ».

Concernant le mariage et l’avortement, il y a lieu de poser quelques questions élémentaires : le pape est-il marié ? N’est-il pas meilleure manière de faire la guerre mondiale au mariage que le célibat volontaire ? Ou le célibat imposé ?

En Italie, l’Église catholique mène sans désemparer une campagne contre la loi (194) autorisant l’avortement, une loi votée il y a quarante ans. Activée en cela par le Vatican (qui est un État étranger), l’Église pousse les médecins et le personnel paramédical à refuser d’appliquer la loi italienne et vilipende les femmes que la vie a poussées à recourir à cet acte (dans le meilleur des cas) médical.

Cependant, aucun pape ne devra recourir à l’avortement. Retournons-lui sa question à ce pape : « Qui es-tu toi pour oser juger ? Et inciter les médecins à ne pas soigner ? ».

Pour conclure

Face à ce système orwellien, discriminatoire et oppressif, on se demande comment sortir de ce bourbier institutionnel et clérical et on ne peut conclure qu’à la nécessité de l’abrogation du Concordat et d’une profonde révision de la place de l’Église catholique ainsi qu’à la remise en cause et à la suppression des avantages discriminatoires qui lui sont accordés.

En somme, il s’agit de décoloniser l’Italie.

Alors, Garibaldi pourra enfin dormir tranquille.


Notes

  1. Marco Valdo M.I. – L’Athée et la Constitution ou la Trahison des Clercs en Italie – https://www.athees.net/lathee-et-la-constitution-ou-la-trahison-des-clercs-en-italie/ – 29 décembre 2016 – ABA – Lettre périodique – 2016. ↑
  2. Carlo Troilo, « Date a Cesare quel che è di Cesare. Per una revisione del Concordato ». (Rendez à César ce qui est à César. Pour une révision du Concordat), 14 février 2017, MicroMega, 2017. ↑
Tags : anticléricalisme athéisme catholicisme Concordat Italie Latran Vatican

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