LA FIN DES ILLUSIONS TENACES ?

Dans le premier numéro de cette Newsletter, j’avais exprimé mes doutes et une certaine surprise sur les positions que Christian de Duve avait exposées en 2011, dans son opuscule De Jésus à Jésus en passant par Darwin.

En effet par rapport à des textes antérieurs où il avait manifesté de sérieux doutes sur l’idée de dogme et sur le dogme chrétien, je voyais dans son dernier travail un retour aux illusions chrétiennes (De Jésus à Jésus, …), à Jésus comme sage suprême, même s’il reconnaissait que la science ne pourrait démontrer l’existence de Dieu – pas plus que son contraire d’ailleurs -.  Venant d’un pareil scientifique, c’était important mais il restait qu’on peut croire pour d’autres raisons que purement rationnelles(1).


Inlassable, Christian de Duve vient de publier fin 2012 « Sept vies en une, mémoires d’un prix Nobel ».  Le ton n’y est pas le même, il y est bien meilleur à mon sens.


Agé maintenant de 95 ans, Christian de Duve veut sortir du « flou artistique » qu’il paraissait cultiver autour d’une « Ultime réalité ».  Cette fois, il refuse de se rallier au concept d’être immanent : « L’Ultime réalité n’est pas une entité intemporelle, mais une conception de mon esprit rattachée à l’endoctrinement déiste de ma première enfance.  Je fus platonicien, croyant à un monde métaphysique qui existerait en dehors de nous, je suis passé depuis de l’autre côté »(2).  Dieu, Ultime réalité, tout cela n’est donc plus pour lui qu’une construction humaine.


Voilà qui tout à la fois ne peut que satisfaire les athées et les rationalistes, tout en montrant simultanément l’extrême difficulté que Ch. De Duve a éprouvée à se détacher de ses premières croyances et de son milieu.  C’est compréhensible psychologiquement et nul doute qu’il a longtemps songé au poids de la parole d’un prix Nobel … et à celui de son long silence.

 

 

Patrice DARTEVELLE.

 

 

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  1. On peut le voir dans plusieurs effarantes déclarations reproduites dans le dossier « Dieu.  Une bonne idée » du numéro de décembre 2012/janvier 2013 de Philosophie Magazine

  2. Je cite d’après l’article de Guy Duplat dans La Libre Belgique du 3 janvier 2013